Madame la Présidente,
La photographie du Bilan social 2019 qui nous est présentée aujourd’hui est le reflet de cette politique antisociale dont ont été victimes les hospitaliers durant toute cette année 2019. Pire encore en 2019, non seulement les objectifs en matière d’économie imposés aux hôpitaux fixés par le gouvernement, pour rappel 650 millions d’euros, ont été respectés mais ont également été très largement dépassés. Les bons petits soldats de Directeurs dans les établissements ont œuvré pour que ces objectifs soient scrupuleusement respectés au détriment de la santé des hospitaliers. Un petit rappel, en termes d’économie pour mieux comprendre l’évolution des arrêts de travail en 10 ans. Au total, les hôpitaux ont subi 11,7 milliards d’euros de coupes budgétaires en 10 ans (chiffre rapport sénatorial de 2019).
Alors que Monsieur le Directeur du Personnel se dit être un DRH « heureux » car le CHU de NANTES a augmenté en 2019 ses fiches de paie, cette vision du bonheur au travail ou bien encore celle de la « QVT » que vous essayez de vendre aux agents, n’est absolument pas partagée par une très grande majorité de personnels qui décrivent cette année 2019 comme une année noire.
I - L’EMPLOI
Concernant les effectifs
Cette notion de création d’emploi est plutôt relative. Nous tenons à repréciser que ces nouveaux emplois sont postés majoritairement sur des nouvelles activités pour dégager de nouvelles recettes. Et que l’emploi n’a pas évolué dans les mêmes proportions que l’activité ces dernières années.
Si les chiffres, concernant l’emploi, dans ce bilan sont incontestables, quoi que les agents se demandent toujours où sont ces emplois supplémentaires car leurs conditions de travail ont plutôt tendance à s’aggraver chaque année, il est important de préciser les choses en terme d’effectifs :
Sur le devant de la scène ce sont les emplois précaires qui prédominent et qui représentent plus de 16% de l’effectif en ETPR en 2019 contre 15% en 2018 et 14% en 2017. C’est + de 30% d’emplois précaires en plus par rapport à 2015. En 2015, on comptait 1020,49 ETPR contre 1456,63 ETPR en 2019.
Toujours dans le registre des emplois précaires, on note une augmentation de ces emplois sur les emplois pérennes (de titulaires, de stagiaires et de CDI).
Pour aller plus loin dans l’analyse une note entre 2015 et 2019 une baisse sensible de ces emplois :
2015 : 7577,65 ETPR T/S + 236,28 CDI ce qui fait 7813,92 ETPR
2019 : 7251,28 ETPR T/S + 294,66 CDI ce qui fait 7545,94 ETPR soit une diminution de – 267,97 ETPR d’emplois pérennes. On doit détailler car sinon on va nous traiter de menteur.
Ces chiffres sont incontestables puisqu’ils émanent de l’administration.
Pourquoi la référence 2015. Cette référence est celle du compte financier où est apparaît le plus haut niveau des effectifs pérennes. La diminution significative de ces emplois apparaît en 2016 et n’a jamais retrouvé son niveau antérieur.
Cette augmentation de l’emploi précaire a quatre significations en termes de ressources humaines et d’économie, on peut donc comprendre que Monsieur le Directeur du Personnel soit un DRH heureux, car cette gestion drastique est plutôt économique et ne satisfait qu’à ce critère.
- Faire face partiellement à la montée en charge de l’absentéisme (les arrêts n’étant pas remplacés à 100%)
- Faire des économies (plus d’1 800 000 euros sur deux ans, ces agents n’étant pas rémunérés sur les grilles de fonctionnaires sans compter l’ancienneté)
- Une catégorie de personnel malléable avec une épée De Damoclès suspendue au-dessus de leur tête permettant à l’administration de déréglementer le statut et de les contraindre à volonté
- Une variable d’ajustement en cas de coup dur comme un C.R.E.F par exemple ou au moment du déménagement « Ile de NANTES » étant plus facile de supprimer les CDD que les fonctionnaires et CDI. Pour tous celles et ceux y compris dans les organisations syndicales qui pensent encore qu’il n’y aura pas de suppressions de postes en vue du déménagement qu’ils nous l’écrivent.
Quand à la déprécarisation de l’emploi. Vous ne pouvez pas vous targuer de vouloir mener une politique volontariste de mise en stage alors que celles-ci n’ont progressées que d’une trentaine de mise au stage par rapport à 2018, 27 pour être plus précis. Alors même que le délai de mise au stage a considérablement augmenté ces dernières années passant de 18 mois à plus de 36 mois y compris sur les métiers dit sensibles. Le seul effort contraint dans ce domaine en 2019 l’a été sur le secteur de la gériatrie et de la psychiatrie parce que les agents se sont mobilisés pour exiger la mise au stage des agents contractuels sur ces seuls secteurs d’activité.
D’ailleurs sur ce point, nous vous demandons un état des lieux sur le délai des mises au stage par grade et secteur d’activité avec un état des lieux sur la réalisation au 1er semestre 2020 et sur le prévisionnel du 2ème semestre.
Ces délais de mise au stage beaucoup trop longs, cette politique de l’emploi précaire, les conditions de rémunération des agents contractuels CDD font que l’établissement n’est pas attractif.
II - L’ABSENTEISME
Concernant les conditions de travail et plus largement la « Qualité de Vie au Travail », voici la cartographie du « bonheur au travail » :
L’année 2019 a battu le triste record des arrêts de travail + 21 904 jours par rapport à 2018.
2019 : 244 251 jours d’arrêt de travail. Rapporté à l’effectif physique 9648 agents et non à l’ETP, c’est 25,31 jours d’arrêt de travail par agent.
Les jours d’arrêts de travail pour maladie ordinaire ont explosé +32 903 jours par rapport à 2018 et +37 591 jours par rapport à 2017.
Cette augmentation s’explique en partie par des délais d’instructions de dossiers d’imputabilité au service beaucoup trop long, les agents étant placés en maladie ordinaire le temps de l’instruction, et explique aussi la baisse des maladies professionnelles faussant ainsi la réalité du nombre de maladie professionnelles déclarées et reconnues en 2019.
Ce chiffre d’arrêt de travail à plus que doublé en 10 ans. Cet indicateur n’émeut personne mais démontre bien que les hospitaliers sont épuisés.
Un indicateur qui n’émeut personne et qui démontre que les hospitaliers sont épuisés + 21 904 jours par rapport à 2019 et ce malgré le retour de la journée de carence qui n’a eu aucun effet escompté sur la diminution des arrêts de travail, bien au contraire. Cette journée de carence n’ayant qu’un seul objectif, faire les poches des hospitaliers.
2019 : 244 251 jours Rapportés à l’effectif ETPR (9002 ETPR) c’est 27,13 jours d’arrêts de travails par ETPR, soit plus d’un mois d’arrêt de travail par agent
Pour simplement remplacer à 100% ces arrêts de travail il faudrait au minimum 11 100 mensualités (sur environ 22 jours travaillés par mois hors congés, soit 925 équivalents temps pleins toute l’année). Il faut rajouter les CDD sur postes vacants (449 postes de fonctionnaires pourvus par des CDD soit 5388 mensualités) et ensuite tous les CDD pour les remplacements de congés maternités, paternités et adoptions où l’absence est de 49129 jours pour 2019 soit 186 équivalents temps pleins.
Au total simplement pour remplacer les arrêts maladie, remplacer tous les postes vacants en attendant qu’ils soient pourvus par un fonctionnaire ou par la mise au stage d’un agent contractuel, pour remplacer les congés maternité de paternité et d’adoption il faudrait 925 CDD + 449 CDD +186 CDD ce qui fait 1560 CDD en équivalent temps plein. Nous sommes loin du compte. A ce chiffre, il faut rajouter le remplacement des congés annuels, RTT, congés de formation, des repos fériés, de tous les agents y compris des CDD. On est très loin du compte puisque l’établissement pour 2019 totalisait 1 456,63 ETPR d’agents contractuels CDD tous motifs confondus.
Ces chiffres démontrent la charge physique et mentale que l’on fait supporter aux agents par un déficit chronique d’effectif simplement sur le non-remplacement des arrêts de travail à 100%, le non remplacement de tous les congés maternités, paternités et adoptions à 100%, le non remplacement des congés de formations à 100% etc…
Cet auto-remplacement permanent bouleverse la vie privée des agents par des changements de planning intempestifs et par la dérèglementation permanente du statut. Cette évaluation d’effectif ne tient pas compte des effectifs qu’il faudrait créer dans les différents services où la charge de travail est insupportable de jour comme de nuit. Sans compter les heures supplémentaires au 31 décembre 2019 168 000 heures qui représentent environ 22 400 jours travaillés et les jours versés sur le Compte Epargne Temps 48 482 jours. Au total ces heures supplémentaires et ces jours versés sur le CET représentent un effectif d’environ 268 Equivalents Temps Plein, hors congés.
Cette gestion dangereuse est purement économique et n’est pas sans lien avec le financement du nouvel Hôpital, Capacité d’Autofinancement et Marge Brute obligent. Objectifs budgétaires contraignant reportés de fait sur les organisations de travail.
III – PROMOTION PROFESSIONNELLE - EMPLOI INTÉRIMAIRE - MÉTIERS SENSIBLES
Concernant les promotions professionnelles, le recours à l’intérim et les métiers sensibles identifiés au CHU,
on constate un écart important entre les besoins de l’institution à court et moyen terme et tout particulièrement sur le métier d’aide-soignant et la politique de l’institution en matière de promotion professionnelle :
- des promotions professionnelles pour devenir aide-soignant qui ne sont pas à la hauteur des enjeux de l’établissement. 7 promotions professionnelle par an, alors qu’il est prévu 137 départs en retraite d’agents sur le grade d’aide- soignant d’ici 2022 sans prendre en compte les départs en retraites par invalidité qui augmentent chaque année.
- 200 missions de placement d’intérim sur ce seul métier en 2019 contre 17 missions et placement en 2018
En procédant ainsi, le CHU non seulement par ces refus de promotions professionnelles itératifs démotive les agents qui souhaitent se former pour devenir aide-soignant, le nombre de candidatures étant en baisse chaque année 2016 : 43 refus ; 2017 : 29 refus ; 2018 : 20 et 2019 : 18 refus mais préfère avoir recours à l’emploi intérimaire qui est coûteux et mettre ainsi en danger l’offre de soins dans notre établissement par la fermeture de lits faute de pouvoir recruter suffisamment d’aides-soignants, ce métier étant en tension sur notre territoire.
Le CHU et l’ARS qui chaque année sont interpellés par notre organisation syndicale par lettre ouverte sur cette problématique se rendent complices de cette pénurie d’aide-soignant organisée dans notre établissement, même si on ne nie pas que ce métier est de moins en moins attractif lié aux mauvaises conditions de travail, à la pénibilité de ce métier et aux mauvaises conditions de rémunérations.
Pouvoir évoluer au sein de l’établissement fait aussi partie de cette notion d’attractivité.
Concernant la discrimination Hommes-Femmes
Nous affirmons que les salaires dans la fonction publique hospitalière qui est majoritairement composée de femmes sont discriminatoires et que de se retrancher derrière des grilles de rémunérations qui sont appliquées aussi bien aux hommes qu’aux femmes n’est pas un argument suffisant pour se retrancher derrière une non-discrimination. L’Etat employeur ne peut pas prétendre défendre ou bien légiférer sur l’égalité homme femme alors qu’il ne l’applique pas à ses agents.
Comme chaque année, sur le bilan social nous ferons les vœux suivants :
Sur le point des arrêts maladies, le Syndicat CGT fera les vœux suivants :
1-« le syndicat CGT du CHU de Nantes demande le renforcement en effectif du service des conditions de travail, de façon à ce que les dossiers de maladies professionnelles, d’accidents de service, de trajet, de maladies contractées en service soient instruits dans un délai maximum de 90 jours. Ces 90 jours correspondent à la prise en charge 100% du salaire pendant trois mois au titre de la maladie ordinaire ».
2- « le syndicat CGT exige que tous les arrêts de travail, les formations, les congés annuels soient remplacés. Nous exigeons des effectifs de suppléances à la hauteur des besoins de façon à prodiguer des soins de qualité, assurer la sécurité des patients et préserver la santé au travail des agents ».
3- « le syndicat CGT exige le retrait, sans délai, de la prime de présentéisme, celle-ci étant purement discriminatoire et exige de revenir à la précédente répartition ».
4- « le syndicat CGT exige une prime de service pour tous les agents concernés à 8,5% »
Sur ce chapitre de l’emploi précaire, le Syndicat CGT fera les vœux suivants :
5- « Le syndicat CGT exige que toutes les mensualités de remplacement pour 2019 soient transformées en emplois de fonctionnaires »
« Le syndicat CGT exige la mise au stage de tous les agents contractuels, y compris les personnels de recherche ».
6- « Le syndicat CGT exige des créations d’emplois à la hauteur des besoins, en plus de ceux déjà exigées dans le cadre du renforcement des équipes de suppléances, de façon à mettre en place des organisations de travail accompagnées de condition de travail digne de ce nom. Permettre ainsi de respecter le statut de la fonction publique hospitalière en matière de planning et en finir avec les astreintes non réglementées sur les différents PHU recomposés ce qui devrait pouvoir endiguer cette hémorragie d’arrêts de travail ».
7-« le syndicat CGT exige la ré-internalisation de tous les emplois externalisés au sein de notre hôpital public comme par exemple les activités de bionettoyage, de sureté malveillance, sur le service technique etc… »
Puis la CGT fera le vœu suivant, compte tenu de la suppression des emplois en vue de l’Ile de NANTES :
8- « La CGT exige le maintien de tous les emplois ».
Sur le sujet de la formation la CGT fera les vœux suivants :
9- « Le syndicat CGT exige que soit financé, en promotion professionnelle, chaque agent reçu à un concours d’entrée aux écoles »
10- « Le syndicat CGT exige que l’établissement déploie des financements de promotions professionnelles à la hauteur des besoins et des enjeux sur le métier d’aide-soignant »
11- « Le syndicat CGT exige que l’établissement déploie les moyens suffisants pour financer chaque demande de formation de longue durée et que la catégorie C ne soit pas laissée pour compte ; un droit égal à la formation pour tous ».
Concernant d’autres points du bilan social tout autant importants et en lien avec l’amélioration des conditions de travail, les places de crèche restent insuffisantes en nombre ce qui ne va pas sans poser de problèmes aux agents qui travaillent en horaires variables : la CGT fera le vœu suivant :
12- « Le syndicat CGT du CHU de Nantes exige que le CHU honore toutes les demandes de places de crèches des agents du CHU en créant le nombre suffisant de places et sur des amplitudes horaires et en adéquation avec les horaires variables de travail, avec la création des d’emplois nécessaires ».
De ce Bilan social 2019, un seul constat, une situation qui s’aggrave d’année en année, qui met à mal les hospitaliers par des organisations de travail dangereuses exposant leur santé physique et psychologique, par des méthodes managériales indignes et dangereuses que vous cautionnez mettant les agents dans des situations de stress important avec un risque élevé de passage à l’acte.
Ces organisations de travail sous évaluées en effectifs, ces réorganisations du conventionnel vers l’ambulatoire ne peuvent absorber toute l’activité allongeant ainsi, de fait, les prises en charge au sein même du CHU de Nantes, même celle qui nécessitent une prise en charge urgente et amènent les patients à être dirigées systématiquement vers le secteur privé, lorsque cela est possible ce qui est inacceptable.
Pour toutes ces raisons le syndicat CGT du CHU de NANTES votera contre ce Bilan social 2019.
Nous exigeons des moyens pour l’Hôpital Public.
Concernant le Bilan de santé au travail
Le même constat que les années précédentes, des effectifs qui n’évoluent pas en même que la charge de travail sur ce secteur qui est de plus en plus sollicité et travaille toujours dans l’urgence à flux tendus. Conséquence, le secteur de santé au travail n’intervient que trop souvent en prévention secondaire ou tertiaire, alors que les efforts de prévention doivent être concentrés sur la prévention primaire.
Par contre, nous regrettons que ce rapport ne soit pas plus étoffé concernant cette souffrance au travail, cet épuisement professionnel qui s’est traduit par ces nombreux arrêts de travail. Pour 2019, la médecine du travail a également fait le constat que les risques psychosociaux, les épuisements professionnelles sont en augmentation et qu’ils touchent toutes les catégories socio-professionnelles y compris le corps médical. Nous regrettons que ces données ne soient pas suffisamment identifiées dans le bilan social.
Un élément nouveau, ce projet de déménagement qui génére de l’anxiété chez les agents.
Nous estimons que le service de santé au travail manque de moyens pour répondre aux attentes des salariés et remplir pleinement sa mission, dans ces conditions nous ferons le vœu suivant :
« Le syndicat CGT exige des moyens supplémentaires pour le secteur de santé au travail pour qu’il puisse mener à bien ses missions et ce en toute indépendance ».